Pôles générateurs de déplacements

L'ESSENTIEL

Les pôles générateurs de déplacements sont les lieux d’activité ou d’intérêt, dont le pouvoir d’attractivité est plus ou moins étendu, selon notamment la concentration des fonctions qu’ils apportent. On distingue les pôles fonctionnels (gares, nœuds routiers, etc), les pôles d’activité et d’emploi, et les pôles d’équipements et de services, dont les fonctions peuvent se cumuler. Certaines polarités peuvent se renforcer ou au contraire perdre de leur fréquentation selon d’autres facteurs que la concentration et la qualité de l’offre qu’elle propose. La qualité des aménagements peut par exemple amener certains espaces publics à être des lieux de rencontres et de loisirs dynamiques et vivants, et renforcer la polarité.

Ces pôles structurent les pratiques de déplacement des habitants : c’est pourquoi il est nécessaire dans le diagnostic de les identifier et de les localiser, pour permettre d’évaluer leurs conditions d’accessibilité par tous les modes de déplacements et ajuster les actions en conséquence (améliorer les cheminements en modes actifs, réguler le stationnement, par exemple).   

Qu’est-ce qu’un pôle générateur de déplacements ?

Les pôles générateurs de déplacements sont les espaces attractifs à l’échelle du territoire. Pour un individu, ces pôles sont d’autant plus attractifs qu’ils concentrent les offres de services et sont proches de lui. Autrement dit, un espace présentant plusieurs sources d’intérêt va attirer des individus dans un périmètre plus ou moins important. Ces polarités peuvent s’exercer selon différentes logiques qui se superposent en partie : professionnelle, commerciale, médicale, récréative, touristique, etc. Il peut donc s’agir aussi bien d’entreprises, de bureaux, d’entrepôts logistiques que de sites patrimoniaux et de zones de loisirs, des nœuds de communications comme des gares, etc. Selon l’importance des pôles, ceux-ci influencent les pratiques de déplacements sur un espace plus ou moins étendu selon les motifs (très étendu pour les études supérieures mais resserré pour les établissements scolaires publics du premier degré -écoles maternelles et primaires- par exemple).

Il est donc possible d’identifier plusieurs échelles de polarisation. Si les grandes dynamiques de générations de déplacements des pôles urbains sont bien sûr déterminantes pour le territoire, les pôles secondaires ne doivent pas être négligés. En effet, ils jouent un rôle essentiel dans la vie locale et sont du fait des moindres distances plus facilement concernés par des politiques de report modal (privilégier l’usage de navettes, du vélo ou de la marche plutôt que la voiture pour les rejoindre).

Ces pôles sont aussi caractérisés par d’autres éléments tels que :

  • les pratiques de fréquentation : rythme (quotidien, hebdomadaire, plus espacé…), horaires ;
  • des conditions et contraintes : horaires contraints pour une gare ou certains emplois,  produits achetés qui peuvent être lourds ou volumineux à transporter dans le cas d’un supermarché...

Ces éléments peuvent influer sur le potentiel de report modal et les modes envisageables.

Les différents types de pôles

les pôles fonctionnels :

Il s’agit des infrastructures de transport qui ont un rôle important dans l’organisation des mobilités : les échangeurs autoroutiers, les gares et haltes TER, les pôles d’échange ou encore les aires de covoiturage (qui génèrent relativement peu de déplacements mais ont une dimension stratégique) . L’attractivité de ces pôles peut être encore renforcée lorsqu’ils concentrent d’autres services ou commerces (une gare ferroviaire dotée de commerces et d’un café, par exemple).

Dans les territoires ruraux, on cherche à renforcer cette fonction de polarité, en aménageant des « hubs », ce qui permet de réduire le nombre de déplacements (les personnes ne font qu’un déplacement pour plusieurs motifs) et de faciliter le report modal (usages d’autres modes de déplacement que la voiture).

 

les pôles d’activités et d’emploi :

Etant donné le poids des mobilités pendulaires (déplacements quotidiens pour se rendre au travail ou aux études, de l’école à l’université), les espaces concentrant les emplois et les activités sur le territoire génèrent aussi une part importante des déplacements. Ces pôles sont donc concernés par des temporalités très liées aux horaires de travail et aux heures de pointes.

De manière relativement simple, pour permettre d’identifier les principaux pôles d’emploi et l’organisation du territoire à cet égard, il suffit de mettre en parallèle trois indicateurs sur des sous-espaces (par exemple, à l’échelle des communes) :

  • le volume d’emploi,
  • le taux annuel d’évolution de l’emploi
  • l’indice de concentration de l’emploi.

Il est alors possible d’en déduire quantitativement la demande de mobilité liée, mais aussi d’identifier deux types de difficultés : des phénomènes de congestion pour les concentrations trop importantes ; et des phénomènes de dépendance à la voiture pour les fortes dispersions – qui peuvent aussi se produire en cas de grande concentration liée à une absence d’alternative à la voiture particulière. L’analyse de la nature des emplois peut permettre de préciser ces contraintes sur les mobilités : le besoin d’utiliser un véhicule motorisé pour les déplacements professionnels, le fait d’avoir à transporter du matériel pour venir travailler ou encore les horaires décalés (usines et hôpitaux fonctionnant 24h/24, services de nettoyage fonctionnant en soirée, par exemple) rendent plus difficiles le report modal vers d’autres modes de déplacements que la voiture.

 

les pôles d’équipements et de services :

On observe au niveau régional des disparités d’équipements et de services. Les pôles urbains disposent de l’ensemble des équipements et services permettant de satisfaire tout un ensemble de besoins liés notamment à la santé (médecins, maisons de santé, hôpitaux...), à l’alimentation et aux achats (commerces de bouche, supermarchés, zones commerciales…), aux loisirs (base de loisirs, stades, piscines…), à la culture (cinémas, médiathèques...). D’autres communes disposent d’une offre moins complète et limitée aux services de proximité, moins spécialisés. Les grands pôles peuvent ainsi polariser les déplacements en raison d’une offre plus étoffée. À un niveau plus local, la concentration d’équipements (tels que bibliothèque, école, maison de santé) et services de proximité́ (tels que boulangerie, coiffeur, bar) contribue, au-delà de la polarisation des déplacements, à̀ créer des lieux de vie commune et de rencontre, structurant la vie locale. Par ailleurs, la concentration d’équipements ne fait pas tout : la variété́ et la qualité́ de l’offre ont une incidence sur la polarisation (cas de l’hôpital par exemple).

Des indicateurs comme le niveau de centres d'équipements et de services permettent d’identifier rapidement et facilement les principaux pôles générateurs du territoire.

 

les centralités mises en avant par les habitants

Certains espaces peuvent ne pas être perçus comme centraux pour les habitants et les usagers en dépit des ressources qu’ils regroupent. À l’inverse, certains lieux sont dotés d’une attractivité particulière en ayant tendance à être perçu comme des espaces centraux par les individus, et pouvant alors constituer des destinations privilégiées indépendamment des services ou activités présents sur place. Le fait de favoriser spontanément tel ou tel lieu de rencontres ou de loisirs tient à plusieurs facteurs : l’accessibilité (cheminements, possibilité́ de stationnement, proximité de nœuds de communication, etc.), la qualité́ de l’espace public (cadre architectural et paysager, aménagements et mobiliers urbains accueillants, sentiment de sécurité, etc.), habitudes générées sur du temps long (présence d’un ancien café, etc).

Contrairement aux autres types de pôles générateurs présentés, l’identification de ces centralités générées spontanément par les habitants repose sur un travail plus qualitatif à partir d’entretiens, de questionnaires ou d’observations qui peuvent rendre les analyses des données chiffrées plus concrètes et proches de la réalité vécue.
 

Zoom - exemple

L’Institut d’urbanisme d’Île-de-France, a sur ce sujet effectué des travaux d’analyse spatiale permettant de modéliser sur l’ensemble de la région, à partir des concentrations d’équipements et services, les centralités de proximité (centres-villes, centralités de quartiers, artères commerciales). Ce travail statistique a été précédé d’une enquête qualitative auprès d’un panel d’habitants pour connaître ce qui, dans leurs représentations, « fait » centralité, ou au contraire, ce qui fait frein au bon fonctionnement d’une centralité. Ces travaux sont présentés en détail, ainsi qu’une exploitation de la base permanente des équipements de l’Insee qui a permis de produire une typologie des communes franciliennes en fonction de leur capacité à répondre de manière plus ou moins exhaustive à l’ensemble de la gamme des besoins de leurs habitants. L’intérêt de cette démarche, reposant sur la comparaison de données quantitatives à des entretiens qualitatifs, est d’identifier les espaces appréciés des habitants et des usagers, dans lesquels les déplacements sont aisés et dont l’ambiance urbaine est accueillante. Il peut s’agir de lieux de rassemblement et de sociabilité ou d’espace dotés d’une importance symbolique aux yeux des habitants. Si contrairement aux services ou aux emplois, ces centralités ne génèrent pas de mobilités contraintes, elles façonnent en partie les pratiques de déplacements des individus. En effet, les repérer permet d’identifier quels sont les espaces recherchés et ceux qui au contraire sont évités. Effectuer une comparaison avec d’autres sources de polarisation invite aussi à associer aux espaces nécessaires à la vie quotidienne des lieux de vie agréables.

IAU IDF

Pourquoi identifier et localiser les pôles générateurs de déplacements ?

Les pôles générateurs de déplacements n’épuisent pas les choix de destinations, et encore moins la question de la mobilité : certaines activités ne répondent pas à une logique de concentration (rendre visite à ses proches, faire une balade, travailler en dehors d’un pôle, etc), et certains territoires sont faiblement polarisés. Néanmoins, ils structurent fortement les besoins de déplacements.

Dans la phase de diagnostic, il est donc nécessaire de les identifier et de les localiser. Cela permet de comprendre comment se structurent les pratiques de déplacements, et d’ajuster l’organisation des services de mobilités et les actions destinées à faciliter l’accessibilité de ces pôles par tous les moyens de déplacements. La réponse aux enjeux d’accessibilité des pôles concerne les politiques de transports en commun, de desserte, de stationnement, d’intermodalité, de report modal, d'accompagnement, etc.