Utiliser des classifications et des typologies

L'ESSENTIEL

Avoir une grille nationale de lecture du territoire permet de mieux situer son territoire par rapport à d’autres en prenant en compte son fonctionnement. Les classifications et typologies proposées, réalisées de différentes façons, permettent de répondre à ce besoin. La façon d’aborder les besoins en déplacements du territoire et les offres possibles pourra profiter de l’éclairage d’une classification ou typologie : peu dense, pôle de service de proximité/intermédiaire..., type d’urbanisme, densité…

Différents acteurs nationaux proposent ainsi des classifications et typologies différentes, concernant :

  • les pôles d’équipements et de services,
  • les espaces selon leur densité.

Elles peuvent être utilisées pour comparer son territoire à d’autres territoires ; ou encore analyser la composition de son territoire, soit en appliquant la classification/typologie lorsqu’elle comprend des catégories utilisables à petite échelle, soit en s’en inspirant pour créer sa propre typologie.  

Exemples de classifications des pôles d'équipements et de services

Pôles de service (Gammes de la base permanente des équipements - BPE)

Le regroupement des équipements de la BPE en trois gammes sert de socle à lidentification de « pôles de services » selon le niveau d’équipement des communes : 

  • Les pôles de services de proximité́ sont des communes disposant dau moins la moitié́ (12) des 24 équipements et services de la gamme de proximité
  • Les pôles de services intermédiaires sont celles qui rassemblent au moins 14 des 27 équipements et services de la gamme intermédiaire
  • Les pôles de services supérieurs regroupent enfin celles qui concentrent au moins la moitié́ (18) des 36 équipements et services de la gamme supérieure

Etude « Centralités : comment les identifier et quels rôles dans les dynamiques locales et intercommunales ? »

Un autre indicateur, l’indicateur des niveaux de centres d'équipements et de services est issu des travaux de l'étude « Centralités : comment les identifier et quels rôles dans les dynamiques locales et intercommunales ? » qui a été réalisée par l'INRAE-CESAER en partenariat avec l'ANCT en 2019.

Il s’agit d’une typologie des communes construite à partir de la Base Permanente des Equipements (Insee). Elle permet de distinguer des centres sur le territoire en fonction de leur niveau de service et d’équipement. Cinq catégories sont définies :

  • « Les communes non-pôle : ces communes possèdent des équipements et des services mais leur offre est insuffisante par rapport à celle des communes identifiées comme centres ;
  • Les centres locaux d'équipements et de services : leur offre est restreinte autour d'une douzaine d'équipements du quotidien et/ou de proximité : coiffeur, école élémentaire, restaurant, boulangerie, artisans du bâtiment.
  • Les centres intermédiaires d'équipements et de services : l'offre s'enrichit d'une trentaine de commerces et services, faisant de ces centres de véritables foyers d'activité du quotidien (offre de soin de premier recours complète, activité commerciale renforcée, ...) ;
  • Les centres structurants qui proposent une quarantaine d'équipements supplémentaires, certains essentiels, mais dont le recours n'est pas quotidien : équipements commerciaux plus spécialisés (librairie, épicerie, magasin de chaussures, de sports, d'électroménager, de meubles), hôtels, agences de travail temporaire ; mais aussi des services de santé pus spécialisés : laboratoire d'analyse, ophtalmologie, cardiologie, gynécologie.
  • Des centres majeurs qui offrent des services les plus rares comme certaines spécialités médicales hospitalières, des services de l'aide sociale aux personnes fragiles, des tribunaux, des établissements universitaires, de grands équipements sportifs et culturels et de grande distribution. »


Cette même étude propose de combler l’absence de données sur les flux de déplacements vers ces centres en délimitant une aire de rayonnement ou de desserte « supposée correspondre au périmètre à lintérieur duquel la majorité de la population fréquente les commerces et services de ce centre ». Ces aires sont construites par rattachement des communes au centre le plus proche (en temps de trajet effectif aux heures creuses)

Les données concernant les niveaux de centres d'équipements et de services sont disponible sur le site de cartographie numérique de l’Observatoire des territoires.

Les aires de rayonnement sont accessibles sur le site de l'Observatoire des Territoires.

Services publics

La construction de niveaux de centralité peut aussi s’effectuer de manière relativement simple pour les services publics. Ainsi l’AGAM (agence d’urbanisme de la région de Marseille) propose une cartographie des pôles administratifs de la métropole en prenant d’une part les centralités administratives (préfecture, sous-préfecture, chef-lieu de canton) et les pôles administratifs (c’est-à-dire les communes rassemblant un poste de police ou de gendarmerie, une antenne de pôle emploi et une poste) d’autre part.
 

pôles adminstratifs

 

Exemples de typologies des espaces selon leur densité

La typologie est une démarche visant à identifier des traits caractéristiques d'un ensemble de données empiriques en vue de les classer en types et en systèmes. Cette méthode permet de faciliter l'analyse, la classification et l'étude de réalités complexes. Compte tenu de la variété de situations caractérisant les espaces peu denses, dresser une typologie des territoires constitue donc une manière d’approcher l’hétérogénéité des contextes et enjeux locaux. Or les grands zonages nationaux tels que les unités urbaines ou les aires urbaines n’intègrent souvent les espaces peu denses que par défaut et ne permettent pas de tirer de conclusions quant à la spécificité de chaque territoire. En effet, le rural était associé aux espaces hors des unités urbaines ou hors des aires urbaines, quand le périurbain était défini par sa relation aux pôles urbains. La grille de densité, et sa déclinaison française en espaces peu denses et très peu denses comble en partie cette lacune mais ne prend pas en compte les dimensions économiques des espaces. Aussi plusieurs typologies ont été élaborées afin d’étayer la connaissance des espaces ruraux et périurbains. Nous citerons ici trois d’entre elles, mais il en existe une multitude.

Dans les territoires peu denses, une première démarche est simplement de consulter les typologies déjà élaborées pour voir comment son territoire est classé par rapport aux autres.

Typologie des communes rurales et urbaines élaborée par la DEPP

Nous présentons ici la typologie des communes rurales et urbaines pour décrire le système éducatif élaborée par la DEPP (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance, du Ministère de l’éducation nationale)  en raison de son caractère récent et complet. Si son objectif initial est de décrire les conditions de scolarisation et les parcours des élèves, elle permet de distinguer plus largement plusieurs types de communes rurales et urbaines dans leur lien à la ville. Les données géographiques sont disponibles sur l’outil France Découverte de Géoclip. Précisément la typologie croise deux critères morphologiques (fondés sur la grille de densité et le zonage en unités urbaines) et un critère fonctionnel (basé sur le zonage en aires urbaines 2010), distinguant ainsi 9 types de communes selon leur densité et leur lien aux pôles urbains. Cette typologie permet d’avoir un premier aperçu de la réalité des territoires, même si elle ne permet pas de décrire ou d’expliquer précisément les enjeux du territoire. Par ailleurs le zonage en aires urbaines ayant été remplacé en 2020 par le zonage « aire d’attraction des villes » (toujours fonctionnel et basé sur le lien à l’emploi avec un pôle), la typologie mérite d’être actualisée (ce qui peut être fait assez facilement via un logiciel de type Excel étant donné l’accessibilité et la simplicité des données utilisées).

TYPOLOGIE DES COMMUNES EN NEUF CATEGORIES, ETABLIE PAR LA DEPP

Typologie des communes

 

Typologie des campagnes de la DATAR

Si cette typologie est relativement simple et ne mêle que 3 indicateurs, d’autres typologies plus complètes peuvent cumuler un nombre plus important de variables. Citons notamment la typologie des campagnes élaborée en 2011 pour lex-Datar pour les communes hors des unités urbaines de 10.000 emplois et plus. Si celle-ci n’a pas été actualisée, elle présente néanmoins un intérêt cognitif et méthodologique certain. En effet la typologie a été construite à partir d’une grande variété de critères statistiques, portant notamment sur les populations et les conditions de vie, l’emploi et les activités économiques, les paysages et l’occupation du sol. Cette approche multifactorielle a permis de distinguer 3 classes et 7 types d’espaces :

  • Les campagnes des villes, du littoral et des vallées urbanisées
    • Les campagnes densifiées, en périphérie des villes, à très forte croissance résidentielle et à économie dynamique
    • Les campagnes diffuses, en périphérie des villes, à croissance résidentielle et dynamique économique diversifiée
    • Les campagnes densifiées, du littoral et des vallées, à forte croissance résidentielle et à forte économie présentielle.
  • Les campagnes agricoles et industrielles : sous faible influence urbaine.
  • Les campagnes vieillies à très faible densité́
    • Les campagnes à faibles revenus, économie présentielle et agricole
    • Les campagnes à faibles revenus, croissance résidentielle, économie présentielle et touristique
    • les campagnes à faibles revenus, croissance résidentielle, économie présentielle et touristique dynamique, avec éloignement des services d'usage courant
       
campagne


Un travail de transposition de cette typologie dans des géographies communales plus récentes a été́ effectué par l'Observatoire des territoires, qui décline aussi la typologie en fonction des trois grands types de variables retenus (populations et conditions de vie ; emploi et activités économiques ; paysages et occupation du sol).

Si la création de typologie mêlant un grand nombre de variables demande des connaissances en statistique, la démarche en elle-même présente un intérêt de découverte au-delà de sa technicité. En effet, il s’agit de reconnaitre des profils de territoires à partir d’un certain nombre de caractéristiques et d’identifier les rapprochements porteurs de sens, soit que certaines variables soient corrélées entre elles soit que certains territoires présentent des caractéristiques communes et spécifiques.

Typologie des EPCI France Stratégie

La récente typologie des EPCI élaborée par France Stratégie s’attache à définir des profils de territoires selon les données de « mobilité locales » * (Migration alternantes recensant les déplacements Domicile-Travail et Domicile-Etudes par l’INSEE) mais aussi démographiques et morphologiques. Le type d’EPCI identifié s’accompagne d’une présentation de ses tendances et enjeux propres ainsi que de quelques pistes d’amélioration. Si l’appartenance à un type ne suppose pas une homologie parfaite, car l’exercice repose sur une sélection d’un nombre restreint de variables, elle permet de se situer et de se comparer par rapport à d’autres territoires similaires.

Notamment ce travail identifie trois profils de territoire dont les enjeux de mobilité sont particulièrement forts :

  • Les EPCI du périurbain élargi et des campagnes des métropoles et des villes moyennes, marqués par une croissance démographique importante, des mobilités pendulaires sortantes significatives ainsi qu’un usage ultra-majoritaire de la voiture. La structuration du système de mobilité autour des pôles urbains avec une réflexion sur le rabattement et la tarification constitue alors une piste d’action possible.
  • Les EPCI des villes petites et moyennes, du rural et des grands EPCI. Il s’agit de territoires plutôt autocentrés (les actifs travaillant en majorité au sein du territoire), de faible densité et marqués par un vieillissement de la population. Améliorer le réseau existant (soit par extension soit via des services de substitution) autour de l’accès aux services peut répondre en partie aux enjeux locaux.
  • les EPCI ruraux et périurbains des villes moyennes, très peu denses, souffrant d’une accessibilité faible et d’un fort déséquilibre entre emplois et habitants, sont caractérisés par des distances particulièrement importantes, dont les conséquences peuvent être modérées grâce à la promotion de nouvelles mobilités ou l’optimisation de la desserte ferroviaire ou des principaux axes routiers.

* NB : les données de l’Insee renseignent uniquement sur le couple (lieu de travail; lieu de domicile) sans précision sur la fréquence de déplacements entre ces deux lieux.
 

France Stratégie

Source : France Stratégie (2021), « Mobilités dans les espaces périphériques et peu denses : pour un territoire
plus accessible ? »

Le zonage en unités urbaines de l’INSEE

La notion d'unité́ urbaine repose sur la continuité́ du bâti et sur le nombre dhabitants. On appelle unité́ urbaine une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2.000 habitants.

Sont considérées comme rurales les communes qui ne rentrent pas dans la constitution dune unité́ urbaine : les communes sans zone de bâti continu de 2 000 habitants, et celles dont moins de la moitié de la population municipale est dans une zone de bâti continu.
 

Les modalités sont les suivantes :

  • Communes rurales
  • Communes appartenant à une unité urbaine de 2.000 à 4.999 habitants
  • Communes appartenant à une unité urbaine de 5.000 à 9.999 habitants
  • Communes appartenant à une unité urbaine de 10.000 à 19.999 habitants
  • Communes appartenant à une unité urbaine de 20.000 à 49.999 habitants
  • Communes appartenant à une unité urbaine de 50.000 à 99.999 habitants
  • Communes appartenant à une unité urbaine de 100.000 à 199.999 habitants
  • Communes appartenant à une unité urbaine de 200.000 à 1.999.999 habitants
  • Communes appartenant à l'unité urbaine de Paris


L’approche en termes d’unités urbaines permet d’aborder la morphologie urbaine du territoire, au-delà des seuls découpages administratifs (même si la commune sert de base de référence).
Ce découpage a été mis à jour par l’Insee en 2020.

La grille de densité de l’INSEE

Grille communale de densité INSEE

Il existe une grande diversité de méthode pour définir la densité d’un territoire. La grille de densité ne confond pas avec une densité « classique » égale au ratio population / surface.

La grille de densité produite par l’INSEE repose sur des mailles urbaines qui sont lagrégation de carreaux de 1 km de côté contigus selon deux critères de densité et de population :

  • Les mailles où la densité de population au carreau est dau moins 1.500 habitants par km2 avec un minimum de 50.000 habitants cumulés
  • Les mailles où la densité de population au carreau est dau moins 300 habitants par km2 avec un minimum de 5.000 habitants cumulés
  • Les mailles où la densité de population au carreau est dau moins 25 habitants par km2 avec un minimum de 300 habitants cumulés
  • Les autres mailles ne remplissant pas ces conditions


En agrégeant ces mailles à l’échelle des communes, la typologie de lInsee distingue 4 types de territoires :

  • Les communes densément peuplées ;
  • Les communes de densité intermédiaire ;
  • Les communes peu denses ;
  • Les communes très peu denses


La grille de densité propose ainsi une alternative pertinente à l’opposition entre espaces urbains et ruraux en fondant son approche sur des critères morphologiques et démographiques. Dans le champ des mobilités elle est d’autant plus intéressante qu’elle révèle des problématiques spécifiques à chaque type d’espace. En effet les enjeux et les contraintes ne sont pas les mêmes selon que l’on se situent dans une commune dense, intermédiaires, peu ou très peu dense. C’est d’abord la dispersion des individus et des activités qui fait que les modes privilégiées dans les grands pôles urbains seront différents de ceux des espaces périphériques ou ruraux. Cette adaptation variable des solutions de transports tient en partie à leur capacité à prendre en charge des flux plus ou moins massifiés et à offrir une souplesse d’utilisation répondant aux besoins des usagers. C’est pourquoi la voiture particulière, du fait de sa capacité à s’adapter à tout type de besoins individuels de déplacements, est souvent plébiscitée dans les territoires de faibles densités. D’autres modes de déplacements individuels existent (vélo, marche, mais aussi modes intermédiaires comme les VAE, les mini-voitures, etc.) mais l’inadaptation des infrastructures et des équipements ainsi que les distances à parcourir relativement importante en limite le potentiel. Quant aux modes de transports collectifs, les faibles densités imposent souvent de réfléchir à un compromis entre performance du service (cadencement, vitesse) et la desserte (nombre d’arrêt, itinéraire plus ou moins directe), pour assurer sa qualité en modérant les coûts pour la collectivité. Les espaces peu denses et très peu denses se prêtent alors a priori peu à des modes lourds de type bus ou train, car ces derniers supposent un cadencement important pour souvent incompatible avec les usagers potentiels. Néanmoins, ils peuvent s’avérer pertinents lorsqu’ils sont associés à des axes structurants, des aires de rabattement et des centralités secondaires bien pensés.